Wednesday, 21 November 2007

François Jullien :

Soyons clairs : je ne me suis pas intéressé à la Chine pour fuir la pensée européenne ou trouver une pensée autre qui compenserait des " manques " de l'Occident, mais au contraire, c'est mon intérêt pour la pensée grecque qui m'a incité à faire ce pas de côté. Je voulais la réinterroger depuis un " dehors ". Pour un helléniste, à l'École normale supérieure où j'étais à l'époque, le plus courant était de prolonger par le sanscrit. Mais on reste là dans nos racines indo-européennes, dans le monde de la grammaire, de la métaphysique. Or je cherchais un lieu véritablement extérieur, autant par la langue (il fallait sortir de l'indo-européen) que par les rapports d'histoire (ce qui éliminait le monde arabe ou hébreu, trop proches). En même temps, je voulais une pensée qui soit aussi explicitée, argumentée, commentée que la pensée grecque. Seule la Chine remplissait ces trois conditions. Résultat, je me suis retrouvé à Pékin, étudiant le chinois et enseignant la littérature française alors que finissait la Révolution culturelle (1977-78)...

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